[Archives] Inauguration de la 1ère Unité Hospitalière Spécialement Aménagée

Monsieur le Directeur,

Madame le Ministre d’Etat, chère Simone VEIL,

Madame le Ministre, chère Roselyne BACHELOT-NARQUIN,

Monsieur le Ministre, cher Michel MERCIER,

Madame le Ministre, chère Nora BERRA,

Mesdames et Messieurs,

L’inauguration de cette première unité hospitalière spécialement aménagée marque une avancée essentielle dans la prise en charge médicale des détenus.

Toutes les études le prouvent : la population carcérale est plus touchée par les maladies mentales que l’ensemble de la population. Aujourd’hui, 55% des détenus arrivants sont atteints de troubles psychiatriques. 1 détenu sur 5 a déjà fait l’objet d’un suivi psychiatrique à l’extérieur.

Il faut adapter l’offre de soins médicaux aux besoins réels de santé en détention. C’est le sens de l’action que nous avons décidée avec Roselyne BACHELOT-NARQUIN.

Ma philosophie est celle de la loi pénitentiaire. Pour lutter efficacement contre la récidive, je veux favoriser l’individualisation de la peine en fonction du profil du détenu. Un détenu atteint d’une lourde pathologie psychiatrique ne peut pas être traité comme un autre.

Mesdames et Messieurs,

L’amélioration des conditions de soin en détention suppose une détermination commune de la part du ministère de la Justice et du ministère de la Santé. Roselyne BACHELOT-NARQUIN et moi-même sommes pleinement engagées dans cette voie.

Le développement des unités hospitalières spécialement aménagées est une première étape dans le renforcement global de la présence médicale en prison.

*

*   *

Les unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) accueillent des détenus présentant des troubles psychologiques particulièrement graves. Leur fonctionnement repose sur la coopération entre personnels médicaux et personnels de l’administration pénitentiaire.

Chacun reste dans son rôle.

La garde et la surveillance des locaux incombent à l’administration pénitentiaire, les soins au personnel soignant et médical. Le personnel pénitentiaire est chargé de la sécurité des périmètres des locaux de soin. Il n’intervient au sein des locaux qu’à la demande du personnel soignant. L’hospitalisation peut se faire avec ou sans le consentement de l’intéressé.

L’ouverture de l’UHSA de Lyon s’inscrit dans un vaste programme de création d’unités hospitalières. L’unité aménagée de Lyon est désormais fonctionnelle. L’unité de Rennes est prévue pour juin 2011.

Une évaluation de ces deux premières unités était prévue avant de lancer la construction des suivantes. Devant l’urgence et la gravité de la question de la prise en charge de ces détenus souffrant de troubles mentaux, nous avons obtenu avec Roselyne BACHELOT-NARQUIN qu’une UHSA au moins par région pénitentiaire soit construite sans attendre.

*

*   *

Mesdames et Messieurs,

Cette UHSA résulte du travail conjoint de l’administration pénitentiaire et des professionnels de santé. Pour renforcer la présence médicale en prison, il faut aller plus loin.

Les axes d’action sont multiples.

L’adaptation de l’offre de soins au profil des détenus exige un travail approfondi.

Je m’en tiendrai à deux exemples.

Certains détenus condamnés à de longues peines ont besoin d’une prise en charge médicale spécifique. Or, celle-ci est aujourd’hui largement insuffisante au sein des maisons centrales. Des services médico-psychologiques régionaux existent pour les maisons d’arrêt. Je propose de structurer les services psychiatriques de la même façon pour les maisons centrales.

Autre exemple, celui de la prise en charge des délinquants et criminels sexuels. Leur prise en charge médicale est indispensable à la prévention de la récidive. Certains établissements pénitentiaires comportent un nombre important de détenus de ce type. Ils ont été identifiés. Il faut désormais prévoir les moyens adaptés en termes de soins médicaux.

La prévention du suicide est un autre aspect de la présence médicale en prison.

Le nombre de suicides en prison est aujourd’hui stabilisé. Pour autant, il demeure trop élevé.

En août dernier, j’ai décidé un plan d’action pour améliorer notre réponse face à la situation.

900 surveillants, exerçant dans des quartiers à risque, ont reçu une formation spécialisée. Les dotations de protection d’urgence, dits « kits anti-suicide », ont été utilisés à 300 reprises.

Les mesures prises commencent à porter leurs fruits.

La situation s’est améliorée dans les quartiers disciplinaires. Je souhaite que l’amélioration porte désormais sur l’ensemble des lieux de détention. Pour cela, il est urgent de changer nos méthodes, autour d’une triple exigence :

1) Développer le partage de l’information sur le terrain. Le secret partagé, dans le respect des compétences de chacun, est l’une des clés de l’efficacité de la prise en charge.

2) Favoriser la remontée d’information. Il faut faire preuve de davantage de réactivité, notamment en cas de passage à l’acte. Chaque situation doit être analysée au cas par cas. L’information doit remonter auprès de mon cabinet pour examiner les éventuels dysfonctionnements et les leçons à en tirer.

3) Développer une culture de l’évaluation

J’ai confié au professeur Terra la mission d’évaluer la mise en œuvre du plan de prévention du suicide. Il ne s’agit pas d’évaluer pour évaluer. Mon but est de tirer profit des expériences menées sur le terrain, pour envisager leur généralisation si elles fonctionnent.

Par exemple, le plan prévoit la désignation de co-détenus de soutien pour accompagner les détenus présentant de graves risques. Je sais que certains y sont réticents. Il est important de mesurer sur le terrain l’efficacité d’une telle mesure.

*

*   *

Mesdames et Messieurs,

Nous avons du travail devant nous.

Je sais pouvoir compter sur le professionnalisme des personnels pénitentiaires. Je mesure le courage, le dévouement et la compétence dont ils savent faire preuve en toute circonstance.

Je sais aussi pouvoir compter sur l’excellence des professionnels de santé.

Et puisque cette UHSA porte désormais votre nom, Madame le Ministre d’Etat, chère Simone VEIL, je rends hommage à votre  rôle de pionnier en ce domaine.

Vous possédez une double culture juridique et médicale. Vous incarnez la volonté politique, la détermination et le courage des convictions.

Votre engagement guide notre action. Il oblige chacune et chacun d’entre nous à nous en montrer dignes. Nous le serons.

Je vous remercie.