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Justice de proximité, mode d’emploi

Publié le 17 décembre 2020 - Mis à jour le 11 avril 2023

Le 15 décembre dernier, Éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice, a adressé aux procureurs généraux et procureurs de la République une circulaire relative à la mise en œuvre de la justice de proximité. Retrouvez-les avec ses annexes.

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Le 15 décembre dernier, Éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice, a adressé aux procureurs généraux et procureurs de la République une circulaire relative à la mise en œuvre de la justice de proximité.

Cette circulaire intervient alors que des moyens exceptionnels ont été obtenus pour sa mise en œuvre. Ainsi, ce sont plus de 1 000 emplois dans les juridictions, près de 1 000 délégués du procureur supplémentaires et 200 millions d’euros qui sont affectés à cette priorité.

La justice de proximité vise à faire en sorte que la petite délinquance, longtemps non priorisée faute de moyens suffisants, soit traitée avec la même rapidité et efficacité que la grande. Cette petite délinquance dégrade pourtant considérablement les conditions de vie et donne l’impression d’une impunité de leurs auteurs, faute d’une réponse judiciaire immédiatement visible. La justice de proximité constitue donc une réponse concrète et rapide rendue possible grâce à un budget historique.  

  1. Quels sont les délits concernés ?

La chancellerie a identifié 350 infractions de faible ou moyenne intensité pouvant entrer dans le cadre de la politique de justice de proximité. Sont concernés des délits comme des contraventions classées en grandes catégories parmi lesquelles les tapages et nuisances sonores, les atteintes à la tranquillité publiques (exemple   : occupation en réunion de hall d’ immeubles, intrusion dans des établissements scolaires pour troubler le bon ordre, etc.), les injures, dégradations, rodéos motorisés, etc. >> Voir l'annexe 2

  1. Quel type de réponses pour ces infractions ?

Parmi ses premières missions, le procureur de la République doit orienter les procédures, c’est-à-dire décider des suites qui leur sont données, en fonction de la politique pénale définie par le ministre qu’il a à décliner localement. Ainsi, il peut décider d’une alternative aux poursuites, ou au contraire de saisir un juge.

a. Un recours accru aux alternatives aux poursuites

Le garde des Sceaux demande aux procureurs de prendre des mesures dites « alternatives aux poursuites » particulièrement adaptées pour r é pondre dans des délais rapides à certaines de ces infractions en évitant un procès. Par exemple, le recours au travail non rémunéré ou à l’interdiction de paraître dans un ou plusieurs lieux déterminés dans lesquels l’infraction a été commise ou dans lesquels réside la victime. Elle permet par exemple d’éloigner un jeune d’une bande.

Toulouse : un exemple de bonne pratique à généraliser  

Des dispositions prises par le tribunal judiciaire de Toulouse qui a organisé un circuit-court du travail non rémunéré : l’auteur du délit est présenté, sur déferrement, à un magistrat du parquet dès la fin de sa garde-à-vue et le travail est réalisé dans le délai maximal d'un mois suivant la présentation au parquet.

Comment ?

Pour une mise en œuvre rapide de leurs décisions d’orientation vers des alternatives aux poursuites, les procureurs de la République pourront s’appuyer sur davantage de délégués du procureur de la République, devant lesquels les auteurs des faits pourront être déférés ou convoqués. Les délégués du procureur pourront ainsi notifier aux auteurs des faits les décisions prises par les procureurs.

  • 28 millions d’€ en frais de justice sont prévus au budget 2021 pour accroitre le nombre des délégués et leurs taches à exercer. Le nombre de délégués du procureur va pouvoir être doublé passant de près de 1000 aujourd’hui à 2000
  • Ces délégués du procureur devront se déplacer plus fréquemment dans des enceintes de proximité comme les maisons de justice et du droit, les antennes judiciaires et les tribunaux de proximité. Près de 2000 points partout sur le territoire vont pouvoir les accueillir. Un décret à paraître dans les prochains jours renforçant l’ efficacité des procédures pé nales et des droits des victimes va préciser les missions des délégués du procureur de la République qui peuvent, pour l’exercice de leurs missions, tenir des permanences dans plus de 2000 lieux. En plus des 164 tribunaux judiciaires, ils pourront exercer leurs missions dans les 1748 points et relais d’accès au droit, les 101 conseils départementaux d’accès au droit ou les 147 maisons de justice et du droit ou encore les 32 antennes de justice. Une simplification de l’organisation de ces points d’accès au droit est en cours.

Coutances : un exemple de bonne pratique à généraliser  

Les délégués du procureur sont répartis sur trois sites (tribunal judiciaire de Coutances, maison de la justice et du droit de Saint-Lô, juridiction de proximité d’Avranches). Ils bénéficient, sur chacun de ces sites, de locaux dédiés pour la réception des justiciables et la préparation des dossiers. Le choix du lieu de convocation est effectué en fonction du lieu de résidence de la personne mise en cause.

Les délégués du procureur prennent en compte la quasi-totalité des alternatives aux poursuites ordonnées (environ 1.500 par an) ainsi que les procédures simplifiées (environ 500 ordonnances pénales délictuelles par an).

b. Le recours aux audiences foraines

Contrairement à des délits plus graves qui doivent être jugés par un collège de trois juges, les délits et contraventions de proximité   rel è vent de la compétence d’un seul juge ce qui permettra de la souplesse pour organiser des audiences spécialisées. La chancellerie préconise donc, lorsque le flux d’affaires le justifie, d’avoir recours à des audiences dédiées mais également à des audiences « foraines » dans les 125 tribunaux de proximité répartis sur le territoire (anciens tribunaux d’instance).

Comment ?

  • 914 emplois en plus dès 2020  : Le ministère de la Justice a lancé le plus grand plan de recrutement dans les juridictions depuis ¼ de siècle. Des embauches importantes ont eu lieu et ont permisl’augmentation des effectifs, hors magistrats, en moyenne de 5%, allant jusqu’à plus de 10% dans certaines juridictions. Les emplois ont été accordés aux juridictions sur la base de projets qu’elles ont soumis à la Chancellerie.
  • En annexe 3 :  le tableau de répartition de ces agents recrutés au titre de la justice de proximité. Les efforts ont été concentrés sur les renforts de greffe et les juristes assistants afin de permettre un traitement plus rapide des procédures. Un juriste assistant peut permettre à un magistrat de traiter jusqu’à deux fois plus d’affaires.
  • 13 millions d’euros sont prévus pour favoriser le recours à des magistrats honoraires et à des magistrats à titre temporaire pour atteindre la limite maximum des 300 vacations (de 200 à 300) ce qui permettra, à la faveur d’un redéploiement, d’augmenter le temps d’audience correctionnelle en juge unique des magistrats professionnels susceptibles de siéger dans ces audiences dédiées ou délocalisées.
  • Le ministère va renforcer de 500 son parc de voitures électriques.

La justice civile est aussi concernée : 

25% des recrutements concernent des projets pour le traitement des affaires civiles (affaires familiales, etc.)

  1. Quels outils législatifs ou réglementaires ?

Des outils réglementaire et législatif viennent accompagner ces moyens :

  • Le décret renforçant l’efficacité des procédures pénales et des droits des victimes évoqué ci-dessus.

Une proposition de loi, adoptée en première lecture à l’assemblée nationale qui prévoit notamment un élargissement des mesures alternatives aux poursuites et mesures prises dans le cadre de la composition pénale (exemple   : contribution citoyenne, interdiction de contact avec la victime pour six mois, interdiction de contact avec les complices), des dispositions de simplification relatives au travail d’intérêt général, d’amélioration de la procédure d’amende forfaitaire

  1. Quelle mise en œuvre ?

  • La chancellerie a mis en place des indicateurs de performance qui devront faire l’objet d’une remontée des parquets   :
    • Nombre de réponses judicaires pénales traitées en proximité
    • Nombre de recrutements opérés dans le cadre des moyens débloqués
    • Taux de mesures alternatives aux poursuites dites réparatrices