[Archives] Attentat de Nice

Publié le 15 juillet 2016

Déclaration de Jean-Jacques URVOAS, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Cellule interministérielle d’aide aux victimes, Quai d’Orsay, le 15 juillet 2016 à 16h

A la suite du terrible attentat qui s’est déroulé hier soir à Nice, j’exprime toute ma solidarité à l’ensemble des victimes et à leurs proches.

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J’ai voulu venir saluer le personnel de la cellule interministérielle d’aide aux victimes (CIAV) – dont 30 issus du ministère de la justice – qui y sont mobilisés aux côtés des associations.

 

1-   Mobilisation de l’autorité judiciaire

 

Conformément à l’article 706-17 du code de procédure pénale, une enquête de flagrance a été ouverte par la section (C1) anti-terroriste du parquet de Paris cette nuit à 1h, des chefs de :

-         assassinats en bande organisée en relation avec une entreprise terroriste ;

-         tentatives d’assassinats en bande organisée en relation avec une entreprise terroriste ;

-         tentatives d’assassinat sur personnes dépositaires de l’autorité publique en relation avec une entreprise terroriste ;

-         association de malfaiteurs terroristes en vue de préparer des crimes d’atteintes aux personnes.

Une cellule de crise a été activée par le parquet de Paris afin d’assurer la centralisation de la remontée de l’information et de la direction d’enquête, soutenue sur place à Nice par des magistrats, des greffiers et des moyens de communication dédiés.

Quatre magistrats de la section anti-terroriste du parquet de Paris sont arrivés sur les lieux entre 4h et 5h30 du matin au moyen d’avions spécialement affrétés.

Cette articulation, parfaitement déclinée cette nuit entre le parquet de Nice et le parquet de Paris, résulte de l’application, pour la première fois, du dispositif de crise défini par le ministère de la justice dans une circulaire datée du 18 décembre 2015, un mois après les attentats du 13 novembre.

 

2-   La situation pénale de l’auteur identifié des faits

 

L’auteur des faits, qui a été identifié, a été visé par plusieurs procédures.

Il n’a cependant été condamné qu’une seule fois le 24 mars 2016par le tribunal correctionnel de Nice à 6 mois d’emprisonnement avec sursis pour des faits de violence lors d’une altercation à la suite d’un accident de la circulation, commis avec une arme par destination, en l’occurrence une palette. Le 27 janvier 2016 il avait été déféré et le juge des libertés et de la détention avait fait droit aux réquisitions du ministère public et prononcé un contrôle judiciaire prévoyant les obligations et interdictions suivantes : s’abstenir d’entrer en contact avec la victime, se présenter une fois par semaine au commissariat de Nice et fournir avant le 23 mars 2016 un cautionnement de 1000 euros.

Ce contrôle judiciaire a été respecté par le mis en cause et a pris fin le jour du jugement. Il n’a pas été frappé d’appel et est donc définitif.

L’auteur des faits n’a jamais été incarcéré et ne faisait plus l’objet d’aucun suivi de la part de l’autorité judiciaire au moment de l’attentat.

 

3-   Rappel des moyens déployés depuis 2015

 

Depuis le mois de janvier 2015, la section anti-terroriste du parquet de Paris a été renforcée. Initialement composée de 8 magistrats, elle est passée à 9 en septembre 2015 puis à 11 en janvier 2016.  Deux assistants spécialisés ont été recrutés.

Parallèlement, ont été créés depuis janvier 2016 un cabinet d'instruction passant ainsi de 8 à 9 magistrats spécialisés, une chambre correctionnelle spécialisée et un poste de JLD spécialisé. Et pour septembre 2016, sont prévus un cabinet de juge des enfants supplémentaire, un 2° juge d'application des peines terrorisme. Naturellement, chaque création de cabinet s'est accompagnée de créations de postes de greffiers.

Au niveau de la Cour d'appel de Paris, au siège, une chambre bis de l'instruction spécialisée terrorisme a été créée en janvier 2016.  Au parquet général, les avocats généraux en charge des Assises, compte tenu de la multiplication des affaires criminelles terroristes, sont passés en janvier 2016 de 7 à 9. Une cellule attentat vient en appui de la cellule de crise de la section antiterroriste du parquet de Paris,  composée de 7 avocats généraux et substituts généraux ;  le recrutement de 2 assistants de justice et un assistant spécialisé terrorisme sont intervenus en renfort du service terrorisme du parquet général.

 

4-   La prise en charge des victimes

Conformément au dispositif mis en place après les attentats du 13 novembre 2015, le Premier ministre a décidé l’activation de la Cellule interministérielle d’aide aux victimes (CIAV) à 2 heures du matin.

Aussitôt des représentants du Service de l’accès au droit et à la justice et de l’aide aux victimes (SADJAV) du ministère de la justice ont rejoint la cellule comme écoutants.

30 agents du ministère de la Justice sont désormais mobilisés dans la durée ainsi que des représentants des fédérations d’associations d’aide aux victimes (FENVAC et INAVEM).

Ces volontaires ont bénéficié d'une session de formation ayant permis de les sensibiliser à leur mission d'écoutant. Après un premier filtrage, les appels des proches des victimes sont dirigés vers ces écoutants qui sont chargés de prendre tous les renseignements fournis par les personnes appelantes, de conserver les coordonnées de ces personnes et  de les rappeler dès que la situation des victimes est connue. Ils peuvent aussi proposer une assistance psychologique aux personnes appelantes par l’intermédiaire des associations d’aide aux victimes de leur département.

A la mi-journée 7 466 appels  et plusieurs centaines de mails avaient été reçus.

Un centre d’accueil des familles (CAF) a également été ouvert à Nice. Il s'agit d'un lieu d'accueil unique pour les victimes et/ou leurs proches, afin de leur permettre de se signaler, d'être informés de la situation de la personne qu'ils recherchent, de bénéficier d'un soutien psycho-traumatologique adapté et de fournir les éléments nécessaires à la cellule ante-mortem le cas échéant. Plusieurs agents du SADJAV arriveront dans la soirée pour participer à cette cellule, fournir la même assistance que celle fournie à la CIAV et organiser un accompagnement auprès des proches durant les opérations médico-légales.

L'association d'aide aux victimes MONTJOYE (membre du réseau INAVEM) est présente au CAF de Nice.

Par ailleurs, un pôle dédié aux victimes est mis en place au sein de la cellule de crise du parquet de Paris. Celui-ci se compose d’un magistrat référent victimes, de magistrats dédiés à l'identification, à la synthèse des auditions des victimes et témoins, ainsi que de magistrats affectés à l’institut de médecine légale et à la cellule interministérielle d’aide aux victimes (CIAV). C’est le parquet de Paris qui est responsable de l’établissement de la liste officielle et unique des victimes (décédées, blessées, impliquées).

Cette articulation s’est traduite dès les toutes premières heures de la crise par la mise en œuvre des opérations de médecine légale et de prise en charge des victimes

L’ensemble des acteurs participant à la gestion de la crise applique la nouvelle instruction interministérielle relative à la prise en charge des victimes du terrorisme diffusée par le Premier Ministre le 13 avril 2016.

Localement un magistrat du parquet de Paris est spécialement affecté à la prise en charge des corps, à l’identification des victimes et à la réalisation des opérations de médecine légale.

Sous la direction du procureur de la République de Paris, la prise en charge des corps des personnes décédées relève de la compétence exclusive des services enquêteurs : recensement et transport des corps, démarche d’identification des corps.

Les corps sont relevés au fur et à mesure par la police judiciaire et transportés avec un bracelet sous X (afin d'éviter toute identification hâtive) à Institut médicolégal (IML) et ce, jusqu’à leur identification par l’unité nationale d’identification de victimes de catastrophe (UNIVC).

Les fiches de levée de corps établies lors de leur prise en charge mentionnent tout élément retrouvé à proximité susceptible de contribuer à leur identification.

Les corps des victimes identifiables ou non identifiables sont tous acheminés vers l’IML du CHU de Nice.

Par ailleurs, j’ai activé un dispositif de crise interne au ministère de la Justice permettant une mobilisation 24 h sur 24, le temps nécessaire, de magistrats et d’agents pour coordonner l’ensemble du dispositif pour la remontée d’informations, l’assistance aux victimes et la présence à la cellule interministérielle de crise.

Conformément aux compétences que lui confie le code de procédure pénale, le procureur de  Paris fera un point d’information sur l’enquête à 17h, avec le procureur de Nice.

 

L’autorité judiciaire et les services du ministère de la Justice ainsi que l’ensemble du Gouvernement  restent entièrement mobilisés. Je n’hésiterai pas à venir vous présenter toute information utile si cela paraît nécessaire.

 

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